Comment réagir face aux pleurs des enfants ?
Même avec toute notre bonne volonté, nous sommes trop souvent démunis face aux fortes émotions de nos enfants. Alors, sans plus attendre, découvrons une approche qui répond à la question : comment réagir face aux pleurs des enfants ?
Dans son article « À l’écoute des bébés » Vimala McClure1 écrit :
Imaginez que vous venez tout de suite de traverser une expérience traumatisante, quelque chose qui vous a profondément perturbé. Vous êtes au bord des larmes et êtes incapable de vous relaxer ou de vous concentrer. Vous allez trouver une amie ou votre conjoint pour avoir de l’aide. Vous commencez à parler de ce qui vous est arrivé et de ce que vous ressentez à ce propos.
Après un moment d’empathie, votre amie commence à vous calmer en vous disant : « Ca va aller, ça va aller, n’y pense plus, s’il te plaît ne pleure pas, je ne supporte pas quand tu pleures. Allez, fais-moi un sourire maintenant. Laisse-moi te préparer quelque chose à manger. Peut-être devrais-tu voir un médecin ? » Vous allez probablement sécher vos larmes et intérioriser votre souffrance, de façon à préserver votre amitié et également parce que la réponse de votre amie vous a montré que vous ne pouvez pas être vous-même en sa présence.
Vimala McClure « A l’écoute des bébés »
Maintenant, imaginez-vous dans la même situation, recevant une réponse différente de votre amie. Vous commencez à parler de ce qui vous est arrivé et de ce que vous ressentez. Votre amie vous regarde droit dans les yeux, se penche en avant, et vous prend la main en disant : « Je suis là pour toi, raconte-moi ce qui s’est passé. Je peux voir que tu souffres vraiment et je veux que tu saches que je t’aime et que je veux t’aider à surmonter cette expérience ».
Elle vous embrasse et vous vous relâchez dans de profonds sanglots, protégée par sa présence. Vous vous laissez aller, parfois de façon incohérente et elle vous dit : « Raconte m’en plus… Et ensuite que s’est-il passé ? Cela a dû te faire beaucoup de peine ». Vous la trouverez sincère et cette confiance vous rendra capable de vous laisser aller et de finalement vous reprendre. Votre relation sera plus forte, votre amie se sentira bien parce qu’elle aura été là pour vous et vous vous sentirez plus à même de retrouver un fonctionnement serein.
Vimala McClure « A l’écoute des bébés »
Offrir de l’empathie aux bébés
Vimala a écrit cette histoire pour introduire sa méthode de communication avec les bébés. Elle aide les jeunes parents à comprendre que le bébé a besoin d’être entendu et accompagné pas seulement pour une raison physique mais également lorsque ses pleurs ont une cause émotionnelle.
Pour ce faire, elle propose, entre autres, la méthode suivante :
- Prenez une longue, lente et profonde inspiration et relâchez-vous
- Evacuez toute pensée
- Si c’est possible, entrez en contact avec le bébé les yeux dans les yeux
Si le bébé évite le contact visuel, placez ses mains gentiment mais fermement sur son corps et essayez de faire une connexion avec les mains en lui disant qu’elles voudraient savoir ce que le bébé veut exprimer.
Restez avec le bébé, soyez détendu et réceptif, écoutez et répondez en observant le language corporel de votre bébé. Regardez sa bouche et ses yeux. Lorsque vous vous êtes assuré que votre bébé vous a communiqué tout ce qu’il avait à vous dire et qu’il se sent entendu, réconfortez-le en le berçant, en marchant, ou en le caressant pour l’aider à se réorganiser. Invariablement, un bébé qui se sent entendu dormira plus profondément par la suite et se sentira en confiance.
Lorsque nous écoutons vraiment nos bébés, nous remplissons tous leurs besoins psychologiques.
La coupe de l’âme de cette enfant est remplie à ras bord et lorsqu’elle grandira elle verra les opportunités pour partager cet amour avec les autres. Et comment cela se passera-t-il ? En suivant le modèle qui a été reçu. Elle sera présente pour les autres, comme les personnes qui en était responsable l’on fait pour elle. Quelle magnifique cercle sain !
Vimala McClure « A l’écoute des bébés »
Il est très intéressant de noter qu’il est question de CONNEXION et que l’écoute et la réponse sont apportés par l’OBSERVATION.
Cette pratique est notamment partagée pour un usage pédagogique par la Ville de Gembloux en Belgique.
La certitude que répondre aux pleurs des bébés crée des êtres humains responsables et compatissants
Vimala explique que durant son expérience en Inde, elle fut atteinte de la malaria. Alors qu’elle souffrait de fiévre délirante, toutes les femmes des allentours vinrent prendre soin d’elle. Tour à tour, elles massèrent son corps en chantant jusqu’à ce que la fièvre s’arrête. Elle n’oubliera jamais la sensation de leurs mains et de leurs coeurs.
A plusieurs occasions, elle a vu ces mères, ces jeunes et moins jeunes être capables d’offrir cette présence aimante aux bébés, aux enfants, aux malades…
En pensant à tous les enfants qu’elle avait connu là-bas, elle a réalisé combien ils étaient aimants, chaleureux et enjoués, et ce, en dépis de leurs soi-disantes conditions de vie défavorables. Ils prennaient soin les uns des autres et ils acceptaient leurs responsabilités sans réserve. Elle a alors pensé que, peut être, s’ils étaient en mesure d’être si aimants, détendus et naturels, c’était parce qu’ils avaient été aimés de cette façon en tant que bébés, et que les bébés ont été aimés de la sorte en Inde depuis des décennies.
Transposer cette approche avec notre enfant
Et bien, au-delà de l’application aux pleurs des bébés, on comprend rapidement que nous devrions être capables d’offrir cette forme de présence empathique à tous nos proches, nos jeunes enfants, nos amis, nos parents… lorsqu’ils rencontrent une souffrance émotionnelle.
Or, très peu de personnes ont acquis cette compétence dans nos sociétés occidentales. Nous sommes mal à l’aise et démunis face aux pleurs ou à la souffrance de l’autre et en particulier de nos enfants. Nous souhaitons écourter la situation, changer de sujet, distraire l’autre. Nous nous concentrons sur les faits et argumentons en vue de relativiser la situation vécue. Certains concluent avec l’injonction inconsciente : “sois fort”. Le message est clair, il est temps de remballer ses émotions et de taire sa souffrance.
En effet, combien d’entre nous, ont-ils seulement une fois entendu en retour : “Qu’est-ce que tu ressens ? Parle-moi de tes émotions. Saches que je suis là pour toi…”
Alors, si cette approche parle à votre coeur, je vous propose d’appliquer la méthode de Vimala à vos jeunes enfants et même à tous vos proches la prochaine fois qu’ils vivent une tempête émotionnelle, qu’ils pleurent ou simplement semblent tristes.
Il est d’ailleurs intéressant de voir que Marshall Rosenberg propose une approche similaire en ce qui concerne l’écoute empathique. Vous pouvez retrouver cette séquence dans la section Transformer notre mode de communication habituel de l’article « Résumé du livre : Elever nos enfants avec bienveillance de Marshall B. Rosenberg ».
Passer à l’action en 8 étapes
La prochaine fois que votre enfant pleure ou que l’un de vos proche semble en souffrance, rappelez-vous cette histoire et faites l’expérience suivante :
- Observez votre premier souhait d’écourter la situation, de fuir, de distraire l’autre…
- Prenez une grande inspiration, relâchez-vous et évacuez toute pensée, tout jugement
- Essayez d’accepter que l’autre ressente cette tristesse ou cette souffrance
- Essayer de le laisser s’exprimer, soit par des pleurs, soit par des paroles claires ou incohérentes…
- Proposez-lui même de vous en dire plus
- Verbalisez le fait qu’il a le droit de pleurer et que c’est normal
- Essayez éventuellement de reformuler pour que votre enfant se sente compris
- Evitez de proposer des solutions ou de donner des conseils.
Lorsque l’enfant a reçu une écoute empathique, il va de lui même passer à autre chose lorsque le moment sera venu de le faire.
Surtout ne me croyez pas, expérimentez.Nous sommes tous en apprentissage. Je vous encourage d’ailleurs à partager vos expériences dans cette situation dans l’espace prévu pour les commentaires.
1 Vimala Schneider McClure est née aux Etats-Unis en 1952. Après une expérience dans un orphelinat en Inde alors âgée de 21 ans et après la naissance de son premier enfant en 1976, Vimala décide de s’investir dans la parentalité et l’accompagnement à la naissance. En 1978, elle publie un premier livre révolutionnaire Massage: Manuel pour les parents aimants. Enfin, en 1981, avec Audrey Downes, elle crée une association de formation au massage des enfants : The International Association of Infant Massage Instructors.